« Il
était une fois le Drac. Le Drac était fils du diable.
Il était aussi une fois l'enfant-joli. Et l'enfant-joli
s'était juché sur un pommier de pommes rouges, tout au
fond du jardin, le long du chemin. »
Tel est pris qui croyait prendre... Le Drac, le vilain, le malin Drac va se retrouver, pour notre plus grand malheur à nous, pauvres gens du monde, bloqué hors de chez lui, à la surface de la terre, pour répandre le malheur partout où il passera...
Il aura aussi la malencontreuse idée de faire des enfants, et ceux-ci, bien dissimulés parmi les hommes, s'échineront à jouer des mauvais tours à ceux qu'ils croisent et aux vies desquels ils se mêlent, allant parfois jusqu'à se marier pour certains...
Tel est la trame du recueil, qui va nous servir les aventures des « petits dracs » jusqu'à un splendide final dont on ne sera pas déçu.
Les Contes du Drac constituent donc un court recueil de contes écrits entièrement en occitan (mais traduits en français, rassurez-vous) par Jean Boudou, un auteur plutôt inconnu mais qui mérite bien mieux à mon avis. Ses contes, que l'on va qualifier de « tirés du folklore rouergat » (Boudou était fils d'une conteuse), d'une simplicité brute, tant dans la forme que dans le fond – bien qu'ils ne manquassent pas de réservasser leur lot de surprises – vous charment et vous captivent dès les premières lignes. C'est rythmé et lourd comme la terre et la rocaille, omniprésente, hypnotique comme un vieux blues mal enregistré...
Fascinant d'innocence, effrayant comme l'enfance. Boudou – qui fut en son temps instituteur dans le Rouergue, puis en Algérie, où il termina sa vie en 1975 – parvient, avec sa langue à la fois simple et si riche en expressions inédites, à faire revivre le fabuleux monde des contes tel qu'on le connaît, tels qu'on les entendait au « dans le bon vieux temps »...
L'allemand Georg Kremnitz a dit de lui que « s'il avait écrit dans une langue majoritaire, sa voix serait perçue de partout. ».
Tant mieux, c'est pas moi qui l'ai dit, mais je suis bien d'accord avec lui.
Seul problème : une relative rareté de l'œuvre (pas introuvable non plus, je pense, faut juste le demander), éditée (du moins, la version que j'ai moi, il doit en exister d'autres, je pense) aux Editions du Rouergue, dans un recueil de recueils contenant, en plus des contes du Drac, les Contes des Balssa, les Contes du Viaur, et les Contes de chez moi, dans lesquels on pourra aussi trouver quelques merveilles comme le formidable Fleurette et Piétonel, ou bien le glaçant Château des Rêves, ou encore l'énigmatique Oiseau Bleu... et je pourrais en citer d'autres, tant ils sont chacun, malgré leur brièveté (rarement plus d'une dizaine de pages) comme une entité à part entière.
Mais pour ce qui est des recueils, les Contes du Drac gardent ma préférence, et je ne saurais que vous conseiller de commencer par eux.
Zolg