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E-maginaire
12 mars 2012

MARTIN, Georges, Raymond, Richard : Skin Trade.

skin tradeGeorges R. R. Martin a le vent en poupe, c'est le moins que l'on puisse dire. Bien que déjà culte pour une large partie des lecteurs de fantasy avec sa saga du Trône de fer, c'est aujourd'hui un véritable tsunami qui déferle et submerge les rives du petit archipel du genre SFFF pour abreuver les terres lointaines (commercialement) et difficile d'accès du mainstream. L'épicentre en a été la mise en image de son œuvre maîtresse en série télé. Imaginez un auteur qui dépasse l'espace étriqué du rayon SF pour parvenir aux meilleures ventes sur le fonds de la librairie... Le résultat, pour les éditions J'ai lu, c'est une manne et chacun veut sa part du gâteau. Bien normal en ces temps de crise. Nous assistons donc à une multiplication des titres patrimoniaux de l'auteur, des titres qui, selon les éditeurs, méritaient de revoir la lumière : Riverdream chez Mnémos, Armageddon Rag chez Denoël et, pour ce qui nous occupe, Skin Trade chez ActuSF. J'avais déjà entendu du bien des deux premiers titres et j'étais plus intrigué par ce texte court, de fantasy urbaine, à la mode avant l'heure... Alors, après lecture, peut-on statuer s'il s'agit d'opportunisme éditorial ou d'un véritable coup de cœur ?

Willie Flambeaux n'est vraiment pas un héros : hypocondriaque, porté sur la gaudriole, assez peu courageux avec une fâcheuse tendance à pisser sur les lampadaire, notre héros étant un petit bâtard de loup-garou. Mais Willie à un grand cœur, il est fidèle avec ses amis, comme un corniaud, ce qui n'est pas une qualité dans cette ville au déclin prononcé, ni pour son métier (agent de recouvrement). Quoiqu'il en soit, il survit, apportant son aide s'il le peut, frétillant comme un petit poisson dans une grande mare pleine de merde... Jusqu'à ce que son amie, son amante, soit assassinée de manière atroce. Il demande alors l'aide de Randy Wade, belle détective privé qu'il courtise grossièrement depuis longtemps. Il ne peut avoir confiance qu'en elle pour découvrir qui a commis ce crime horrible. Mais la confiance peut-elle être réciproque dans cette Ville au lourd passé ?

Véritable polar fantastique, Skin Trade utilise tous les bons ingrédients de ce genre : une ville à la dérive, des cadavres dans tous les placards, de grandes familles menant la danse et des héros aux cicatrices émotionnelles cachées. Roman court, les informations s'enchaînent sans temps mort jusqu'à l'inévitable dénouement. On ne s'ennuie pas, on s'accroche aux personnages, on cherche à deviner qui est derrière ce terrible complot. Mais plus qu'un scénario bien monté aux références irréprochables, c'est l'écriture de l'auteur qui donne toute son originalité au roman. En moins de 170 petites pages il s'attache à décrire finement des personnages résolument humains pour les sortir des archétypes dans lequel le genre voudrait volontiers les noyer. Il examine leur relations avec attention rendant prééminent la question de la confiance. On sent bien que ce sont ces questions qui intéressent l'écrivain.

Par son style, il parvient en outre à déployer toute l'écologie, forcément fangeuse d'une ville qui n'évolue plus et vit dans le souvenir de sa gloire passée. Alors même que l'on pourrait penser que le format exigerait de rogner sur les descriptions, Georges R.R. Martin fait de sa Cité, bien qu'innommée, un des personnage principaux de son roman. Elle étend ses tentacules, tentant d'étouffer toute vie, marquant de son Histoire tous les protagonistes de l'intrigue, les entraînant fatalement dans sa chute irrémédiable. Remarquable tour de force, donc, de ponctuer un scénario vif et contracté de descriptions fluides essentielles.

En résumé, Skin Trade allie le fonds et la forme, une intrigue prenante, dans le plus pur style polar hard-boiled fantastique servie par une plume épurée qui fait mouche. On ne peut donc qu’acquiescer au prix qu'il a reçu en 1989 ! Et oui, 1989 ! Pourtant, pourrait-on imaginer plus actuel comme roman alors que la Bit-lit et la fantasy urbaine affolent les foules d'aujourd'hui ? N'est-ce pas vraiment le signe d'une grande œuvre que de rester actuelle malgré le temps qui passe ?

Actusf nous gratifie donc d'un titre essentiel, dont le seul défaut doit être sa taille trop courte, comme tout bon roman. Si l'aubaine éditoriale est indéniable, elle me semble bien plutôt fondée sur l'envie de partager et faire connaître à nouveau un magnifique texte de l'auteur. D'ailleurs, j'en veux pour preuve l'excellente présentation et l'utile biographie que contiennent le livre qui permettent de découvrir l'ample oeuvre de l'auteur. Merci à eux ! Alors ne boudons pas notre plaisir et encourageons tout le monde à découvrir différemment l'écrivain à la mode ! Cerise sur le gâteau, Skin Trade est aussi disponible au format numérique, à moitié prix, l'éditeur ayant récemment franchi le cap, pour mon plus grand bonheur !

StepH

 

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Commentaires
Z
Excellente initiative que ces publications-là ! C'est vrai que c'est souvent difficile de se lancer dans la lecture d'une série sans rien savoir de l'auteur ! <br /> <br /> Si en plus c'est de qualité, alors là... <br /> <br /> Après, moi j'aime bien son nom : "Georges Raymond Richard". Au début en lisant ta chronique, j'ai cru qu'il s'agissait d'une collaboration entre deux auteurs. <br /> <br /> Zolg.
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