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3 mars 2009

LOVECRAFT, Howard Philips :La quête onirique de Kadath L'inconnue

quete_oniriqRandolph Carter – le fameux, le légendaire Randolph Carter me dira-t-on peut-être... *– se met un beau jour ou une belle nuit en quête d'une cité aperçue en rêve, dans un monde tout à fait onirique que l'on va découvrir en suivant sa trace ; une cité dont même lui, rêveur chevronné, n'a jamais entendu parler. C'est dire. Son chemin, comprend-il, devra passer par Kadath, la cité perchée des dieux, que personne n'a jamais vue jusque-là.

Pour commencer son voyage, Carter n'a qu'à descendre les sept cent marches qui le mèneront aux « prêtres barbus de Nasht et Kaman-Thah, dont le temple souterrain s'étend non loin du monde éveillé et au milieu duquel se dresse un pilier de feu » ; tout un programme, une broutille en vérité. En musique, on dit que cela commence « in media res », je crois – au milieu de la chose. Je n'aurais pas dit mieux. Sans avertissement, nous voici dès les premières lignes plongés dans le songeux univers bâti par Lovecraft, sans autre justification ; on n'en saura pas plus sur Randolph Carter, qui il est, d'où il vient, même si quelques indices seront parsemés au long du livre ; seul son nom, perdu et étrangement discordant au milieu des Zin, Shantak Barzai-le-sage et autres Nyarlathotep, évoque une éventuelle parenté avec notre monde. Il faut dire, La Quête Onirique... ferait partie d'un « cycle » plus long, que l'on trouve en intégralité dans le recueil Démons et merveilles, (« un rapport avec la chanson ? » - je pourrais guère vous le dire**) et qui narre les aventures dudit Randolph Carter : ceci explique peut-être cela, mais pour ma part, je l'ai point lu *** ; et quoi qu'il en soit, les aventures du bonhomme le mèneront ici d'une région à l'autre du pays des rêves, où il aura affaire à d'innommables créatures et nouera des alliances avec des chats, des goules – dont « celle qui avait été autrefois l'artiste Arthur Pickman de Boston » – pour un périple parfaitement fantaisiste et presque léger, loin des habituels cauchemars lovecraftiens, bien que l'on y retrouve quelques-uns de ses thèmes de prédilection.

Mené tambour battant, dans un style bourré des habituels épithètes de l'auteur (mais sans jamais tomber non plus dans le soporifique), La Quête Onirique de Kadath l'Inconnue est un véritable enchantement où l'on retrouve et où l'on goutte, grâce à une plume incroyablement efficace, la substance presque intacte des rêves et leur logique propre, tout en conservant cohérence et fil narratif. Tout d'un bloc (pas la moindre trace d'un quelconque dialogue, de chapitres, à peine des paragraphes), le texte semble nous prélever hors de la réalité à un moment de notre vie pour nous y ramener, presque inchangés, à la fin du voyage. La faible épaisseur du roman aide à renforcer l'impression, qui ne tiendrait pas, pensé-je, bien plus loin que les quelques cent cinquante pages imprimées là.

Au final, entre bois enchantés, mers lunaires, vins hypnotiques, faméliques de la nuit ou visages divins gravés dans la pierre – et même quelques héroïques batailles ; j'ai parfois cru lire du Tolkien – mille images restent en tête une fois le livre refermé. On ne saurait que trop le conseiller à ceux qui voudraient aller à la rencontre d'un auteur dont les louanges sont souvent chantées, mais qui est je crois, de nos jours, peut-être peu lu du fait d'un univers parfois considéré comme trop âpre, et de son côté « ancêtre » qui peut rebuter certains.

Zolg

*C't une blague, mais c'est aussi parce que je suis pas spécialiste de Lovecraft non plus, alors...

** Car oui, « Démons et Merveilles » est aussi le titre d'une chanson de Jacques Prévert. Jacques Prévert aurait-il lu Lovecraft ? Ce dernier était-il déjà traduit à l'époque où la chanson a été écrite ? Si un musicologue pouvait nous répondre, ce serait fameux je crois.

***J'ai appris ça par hasard, quand je rédigeais la présente notice... Comme quoi, quand je dis que je suis pas spécialiste de Lovecraft !

 

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Commentaires
M
Et en plus, oui, tu as déjà dis du mal de Lovecraft en ces lieux (cf ta critique de la Bd sur Herbert West, réanimateur).<br /> En revanche, je vous rejoins totalement tous les deux lorsque vous dites que cet ouvrage (que je n'ai pas lu) semble tenir une place particulière dans l'oeuvre lovecraftienne, comme une sorte de bilan, où il fait mumuse avec ses propres créations. Je serai curieux de savoir quand il l'a écrit, par rapport à tout le reste.<br /> Pour la goule, Zolg, pas besoin de passer par Gouggle (arf) pour savoir qu'il parle du célèbre "modèle Pickman" de la nouvelle éponyme, qui selon mes souvenirs nébuleux, parlait d'un artiste, de tableaux, de galeries souterraines qui menaient dans un cimetière, et de goules donc. Ainsi que de vérités indicibles et de lunes gibeuses. Mais pas de Jacques Prévert.
Z
Bien, je dois dire, concernant l'homonymie entre l'oeuvre précitée de Lovecraft et la chanson, précitée elle aussi , de Jacques Prévert, que ça me paraîtrait tiré par les cheveux. Faudrait voir quand il fut édité pour la première fois, le recueil en question. <br /> Mon opinion personnelle, dois-je avouer, serait que le bonhomme chargé de l'édition avait écouté/entendu/eu vent d'une quelconque façon le morceau du poète au mégot, et il s'est dit :"ah ! Ca ferait un titre formidable !"<br /> <br /> Voilà ce que j'en pense.
Z
Ta remarquable remarque prolonge remarquablement ma propre opinion, cher Steph ; et je dois avouer que, quand j'ai entamé "La quête...", je me suis dit au départ "bon, c'est pour la cause", 10 ans qu'il traînait sur mes étagères, pas très long, allez hop, ça sera fait, et ça rentabilisera l'investissement initial. <br /> Au final, ben chuis pas loin d'envisager de me procurer le fameux "Démons et Merveilles" (toujours pas de réponse pour la chanson?), tant ma surprise fut grande et la lecture fluide. Pis je voudrais bien savoir ce qui est arrivé à "la goûle qui fut autrefois Arthur Pickman de Boston". <br /> <br /> Zolg.
S
Je ne sais pas si j'avais abordé ce sujet ici mais moi je ne suis pas un vrai fan de Lovecraft. Je trouve qu'il est très agréable de lire un ou deux romans de cet auteur mais que l'on tourne vite en rond... Je ne dois sans doute pas avoir accroché vraiment mais découvrir toute la palette du mythe de Cthulhu ne m'intéresse pas au plus haut point. Pourtant, il me semble que l'ouvrage que tu critiques occupe une place particulière (je parle en tant que non spécialiste!) dans l'œuvre de l'auteur. Le monde est étrange, un poil barré et ajoute une véritable pièce au monde effrayant qu'il crée. Après, il faut pouvoir le suivre dans ce monde de rêve pathologique...<br /> <br /> StepH
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