BRUST, Steven, LINDHOLM, Megan : La nuit du prédateur.
Je vous l’ai déjà dit mais encore une fois, il est très dur d’écrire sur ce que l’on aime passionnément. C’est de nouveau le cas ici. La nuit du prédateur est à mon sens un des meilleurs titres du catalogue Mnémos. Alors quand Pocket le publie finalement au format poche, je suis obligé de me faire violence et de tenter de vous expliquer les raisons de mon engouement pour ce titre.
L’histoire est assez complexe à présenter sans déflorer la moitié de l’intrigue. Un vieux flic désabusé enquête sur des meurtres horribles ; un gitan erre, amnésique, dans les rues de Lakota. Il ne sait pas qui il est mais il sait qu’il doit faire quelque chose… Les morts s’entassent autour du gitan… Un conte, une Belle Dame, un Monde étrange… Je ne vous en dirai pas plus, l’intrigue est installée.
Je l’avoue, commencer ce roman est ardu. Alternant entre enquête du policier tenace, quête d’identité du Gitan et conte, les chapitres s’enchaînent au départ sans liens apparents. Imaginez l’orée d’une forêt. Un petit chemin s’ouvre devant vous, à peine discernable. Plein de ronces, vous forçant à quelques souplesses. Vous vous dites qu’il serait plus simple de rebrousser chemin. Mais si vous continuez, vous émergerez sur un petit chemin vierge de toute civilisation, un monde pour vous tout seul. Avez-vous déjà vécu cette expérience ? C’est ici la même chose. Après quelques pages ardues (j’ai voulu rebrousser chemin mais la fée sur mon épaule m’a poussé à continuer), on entre dans un monde envoûtant, vierge de tout poncif littéraire. On suit les héros, on écoute la musique et l’on cherche à entrer dans la danse.
Quête initiatique, OVNI littéraire, pur moment de poésie, voyage dans le monde de féerie, je ne sais pas comment qualifier ce roman. Restent la qualité de l’écriture, de la structure, l’ingéniosité des auteurs. Peut-être ne suis-je pas tout à fait objectif, peut-être le genre de la fantasy urbaine me rend-il clément, en tout cas cela faisait longtemps que je n’avais pas lu un livre aussi beau.
Au final, je me dis que lorsque deux auteurs de qualité unissent leurs efforts, il ne peut en résulter que du bon. C’est faux, mais c’est le cas ici. Les qualités reconnues de ces deux écrivains ont été mises en avant pour gommer leurs défauts. Il ne reste que du bon. Le seul regret que je pourrais avoir, c’est que Célia Chazel et Audrey Petit aient quitté le bateau Mnémos qui nous offrait de merveilleuses pépites. Audrey, je l’espère nous offrira d’autres bijoux pour le nouveau label Orbit (chez Calmann Levy). Célia nous laisse orphelins puisqu’elle quitte le monde de l’édition pour embrasser celui de la traduction. Quant à Mnémos, malheureusement en perte de vitesse, il est repris par Sébastien Guillot, qui nous a offert la découverte d’auteurs incontournables comme Neil Gaiman et qui dirige la très belle collection Interstice (encore chez Calmann Levy).
Pour conclure, je vous dirai donc simplement que ce livre, qui correspond si fort à l’atmosphère automnale qui sévit depuis quelques jours est un incontournable. Amoureux de littérature, fans de fantasy urbaine et de poésie, entrez dans la danse, passez quelques soirées auprès de la roulotte des bohémiens et écoutez leurs chants et leurs histoires, vous en reviendrez, tout comme moi, enchantés.
StepH